Regards croisés sur l'économie, 23. Donner ses données : "Big data", économie et société
de Magali Beffy La Découverte, 2019, 169 p Meilleures allocations des ressources, information partagée, gains de productivité, gains de temps : les promesses du don de ses données à la communauté sont nombreuses. Et si, à la recherche du temps gagné, nous passions à côté de la véritable menace du numérique. Que vaut un don sil nest pas conscient ? A-t-on encore besoin de se faire confiance si tout est véritable ? Quel sera lengagement dans une société où lon ne peut se désengager ? Et plus encore, quelle sera la valeur dune vie et de son dévoilement si elle ne peut être cachée ? À la recherche du temps gagné, La recherche du temps perdu aurait été avortée : « Longtemps, je me suis couché » « Oui Marcel, on sait, de bonne heure, tu nes jamais en ligne après 21h ». Il était une énième fois lhistoire dune soumission volontaire. Lhistoire de la création par chacun dune entité les dépassant tous. Il ne sagit plus, cette fois, dune crainte divine, dun « Big Brother » saffichant fièrement dans les rues ou encore dun capital aliénant ceux qui le produisent. Ce Léviathan dun genre nouveau se fait sobrement appeler « data », un sobriquet latin dépoussiéré par larrivée dun numérique anglophone. Peut-être doit-on dailleurs lui préférer sa version française, « données », et son prolixe équivoque. Donner ses données sans pouvoir les reprendre résonne comme un abandon de soi et un premier pas vers une identité parfaite entre lUn et le tout, le réseau social. Subrepticement, le Léviathan 2.0 assoit son pouvoir, redéfinit le lien social, établit un index nouveau et sexonère de ses dus face aux États. Est-il seulement besoin de lillustrer ? Facebook jauge les amitiés, Twitter décide des informations mensongères, aux États-Unis, Cambridge Analytica brouille la souveraineté populaire en sinvitant dans les campagnes électorales Pourtant, les données demeurent insaisissables et à labri des discours simples car par nature paradoxales. La quantication des résultats des institutions et politiques publiques, destinée à lorigine à rendre ces dernières plus performantes, peut devenir la finalité et non un outil. La menace envers les libertés individuelles du système de notation des individus par le gouvernement chinois est justifiée comme un moyen lutter contre les problèmes de gouvernance. Lutilisation actuelle du « big data » comme point culminant du libéralisme et de léconomie de marché, où même les informations personnelles peuvent désormais se vendre et sacheter comme nimporte quel bien, se heurte à la réalité des pratiques : des informations peuvent être collectées à linsu des individus, et il est même possible de donner les données de quelquun dautre. La transformation de léconomie et des systèmes de financement des entreprises où la « donnée » devient la monnaie déchange ne permet pas de masquer que les oligopoles règnent toujours sur les marchés Ce numéro de Regards croisés sur lÉconomie sinterroge sur la nouveauté relative de ces données particulières, de ses usages pratiques et de ses implications dans la vie économique et sociale. Si la collecte dinformation sur les citoyens existe depuis longtemps, le caractère volontaire et massif de la collecte de données personnelles donne lieu à de nouveaux cadres et de nouvelles perspectives pour léconomie, la société et leur étude. Cest au travers des contributions de spécialistes du sujet, chercheurs et acteurs du « big data » que lon saisit les dé s, limites et réponses possibles à ce phénomène. |
Beffy Magali.
Regards croisés sur l'économie, 23. Donner ses données : "Big data", économie et société.
La Découverte, 2019, 169 p.
Titre : | Donner ses données : "Big data", économie et société |
Titre de série : | Regards croisés sur l'économie, 23 |
Auteurs : | Magali Beffy, Auteur |
Type de document : | texte imprimé |
Editeur : | Paris : La Découverte, 2019 |
ISBN/ISSN : | 978-2-348-04277-5 |
Format : | 169 p |
Descripteurs : | big data / droit à la vie privée / économie numérique / protection des données personnelles |
Résumé : |
Meilleures allocations des ressources, information partagée, gains de productivité, gains de temps : les promesses du don de ses données à la communauté sont nombreuses. Et si, à la recherche du temps gagné, nous passions à côté de la véritable menace du numérique. Que vaut un don sil nest pas conscient ? A-t-on encore besoin de se faire confiance si tout est véritable ? Quel sera lengagement dans une société où lon ne peut se désengager ? Et plus encore, quelle sera la valeur dune vie et de son dévoilement si elle ne peut être cachée ? À la recherche du temps gagné, La recherche du temps perdu aurait été avortée : « Longtemps, je me suis couché
» « Oui Marcel, on sait, de bonne heure, tu nes jamais en ligne après 21h ».
Il était une énième fois lhistoire dune soumission volontaire. Lhistoire de la création par chacun dune entité les dépassant tous. Il ne sagit plus, cette fois, dune crainte divine, dun « Big Brother » saffichant fièrement dans les rues ou encore dun capital aliénant ceux qui le produisent. Ce Léviathan dun genre nouveau se fait sobrement appeler « data », un sobriquet latin dépoussiéré par larrivée dun numérique anglophone. Peut-être doit-on dailleurs lui préférer sa version française, « données », et son prolixe équivoque. Donner ses données sans pouvoir les reprendre résonne comme un abandon de soi et un premier pas vers une identité parfaite entre lUn et le tout, le réseau social. Subrepticement, le Léviathan 2.0 assoit son pouvoir, redéfinit le lien social, établit un index nouveau et sexonère de ses dus face aux États. Est-il seulement besoin de lillustrer ? Facebook jauge les amitiés, Twitter décide des informations mensongères, aux États-Unis, Cambridge Analytica brouille la souveraineté populaire en sinvitant dans les campagnes électorales Pourtant, les données demeurent insaisissables et à labri des discours simples car par nature paradoxales. La quantication des résultats des institutions et politiques publiques, destinée à lorigine à rendre ces dernières plus performantes, peut devenir la finalité et non un outil. La menace envers les libertés individuelles du système de notation des individus par le gouvernement chinois est justifiée comme un moyen lutter contre les problèmes de gouvernance. Lutilisation actuelle du « big data » comme point culminant du libéralisme et de léconomie de marché, où même les informations personnelles peuvent désormais se vendre et sacheter comme nimporte quel bien, se heurte à la réalité des pratiques : des informations peuvent être collectées à linsu des individus, et il est même possible de donner les données de quelquun dautre. La transformation de léconomie et des systèmes de financement des entreprises où la « donnée » devient la monnaie déchange ne permet pas de masquer que les oligopoles règnent toujours sur les marchés Ce numéro de Regards croisés sur lÉconomie sinterroge sur la nouveauté relative de ces données particulières, de ses usages pratiques et de ses implications dans la vie économique et sociale. Si la collecte dinformation sur les citoyens existe depuis longtemps, le caractère volontaire et massif de la collecte de données personnelles donne lieu à de nouveaux cadres et de nouvelles perspectives pour léconomie, la société et leur étude. Cest au travers des contributions de spécialistes du sujet, chercheurs et acteurs du « big data » que lon saisit les dé s, limites et réponses possibles à ce phénomène. |
Nature du document : | documentaire |
Exemplaires (1)
Cote | Section | Localisation | Code-barres | Disponibilité |
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316.4 BEF | Documentaire | CDI | 9782348042775 | Disponible |